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Biram Dah Abeid, chez lui, à Nouakchott, le 5 mars 2024. © MICHELE CATTANI pour JA / Portrai officiel de Ghazouani : @collageTRUST

Décryptage : Biram Dah Abeid, l’homme que Nouakchott craint !

Le célèbre militant abolitionniste mauritanien, député et principal opposant au régime de Mohamed Ould Ghazouani, Biram Dah Abeid, semble être devenu la cible prioritaire des autorités mauritaniennes. Retour sur un parcours marqué par des combats acharnés et une nouvelle dynamique politique qui inquiète le pouvoir.

Un opposant inflexible face à l’autorité

Biram Dah Abeid, figure emblématique de la lutte contre l’esclavage en Mauritanie, s’est forgé une réputation d’opposant inflexible au régime de Mohamed Ould Abdel Aziz (2009-2019). Durant cette période, il a connu la prison, la torture, le harcèlement, ainsi qu’un traitement médiatique hostile. Il a frôlé la mort à plusieurs reprises, mais a refusé l’exil, affrontant le régime jusqu’à sa chute.

La question qui se pose aujourd’hui est la suivante : le “vrai” Biram est-il de retour ? Après un premier mandat relativement calme de Mohamed Ould Ghazouani (2019-2024), caractérisé par des tentatives de dialogue avec l’opposition, le climat politique semble à nouveau s’envenimer.

Un premier mandat sous le signe de l’apaisement

Lors de son premier mandat, Mohamed Ould Ghazouani avait adopté une posture d’ouverture. Il avait rencontré les leaders de l’opposition, y compris Biram Dah Abeid et Samba Thiam (Forces Progressistes pour le Changement - FPC). Cette période avait aussi été marquée par l’affaire dite de la “décennie”, durant laquelle l’ancien président Mohamed Ould Abdel Aziz et plusieurs de ses collaborateurs avaient été traduits en justice pour des crimes économiques.

Cependant, tout a changé après l’élection présidentielle du 29 juin 2024.

Une réélection controversée

Réélu dès le premier tour avec 56,1 % des voix, Mohamed Ould Ghazouani a vu sa victoire contestée par Biram Dah Abeid, arrivé en deuxième position avec 22,1%. Ce dernier continue de qualifier l’élection de “mascarade”, bien que les résultats aient été validés par le Conseil constitutionnel le 1er juillet 2024. La campagne électorale et ses suites ont été marquées par des violences tragiques, notamment à Kaédi, où six personnes ont été tuées selon des sources non officielles (quatre selon le gouvernement).

Si certains candidats malheureux ont reconnu la réélection de Ghazouani, Biram Dah Abeid, lui, refuse de lâcher prise. Lors de ses récentes déclarations, il a dénoncé des pressions exercées par le ministre de l’Intérieur, qui aurait conditionné la reconnaissance officielle de son parti politique à son acceptation de la réélection de Ghazouani et à une rupture avec Samba Thiam et les FPC.

Des accusations graves et une riposte politique

Le 15 janvier 2025, Biram Dah Abeid a accusé les autorités mauritaniennes d’avoir tenté de corrompre la cellule ivoirienne de son mouvement, l’Initiative pour la Résurgence du Mouvement Abolitionniste (IRA). Selon lui, d’importantes sommes d’argent auraient été promises pour fragiliser son leadership.

Face à ces manœuvres, Biram et ses alliés ont récemment formé une nouvelle coalition politique, dénommée “Coalition Anti-système”, avec pour objectif de proposer une alternative au régime actuel et de mobiliser le peuple mauritanien.

Quel avenir pour la Mauritanie ?

La question reste posée : le président Ghazouani optera-t-il pour un dialogue avec Biram Dah Abeid afin de préserver la stabilité politique, comme lors de son premier mandat, ou assisterons-nous à un affrontement similaire à celui qui a opposé Biram à Mohamed Ould Abdel Aziz ?

En attendant, il est clair que les autorités mauritaniennes surveillent de près les activités de l’opposant, déterminées à contenir son influence grandissante. Le futur dira si cette confrontation marquera un tournant pour le paysage politique mauritanien.

Par Grand Thiam pour TRUST Magazine

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